TOP Séries, Place 10 : Breaking Bad
Pour la deuxième année consécutive, AudiencesUSA.com vous présente le Classement Série de la Saison 2011 / 2012. Ici, pas d'audience ou de taux sur les 18-49 ans pour dresser le TOP 45 de l'année. Mais un jugement critique, impitoyable et qui ne mettra pas forcément tout le monde d'accord. Les commentaires seront bien évidemment là pour exprimer votre approbation ou votre indignement face au classement proposé.
Cette année, le classement vous a été concocté par François et Tao du site www.Id-Series.com. Un TOP 45 qui sera déroulé jusqu'à début septembre.
On rappelle que ce classement série a pour objectif de proposer 45 critiques de séries diffusées au cours de la saison 2011 / 2012. Des critiques portant sur des séries qui ont marquées ou caractérisées l'année pour diverses raisons. Le TOP 45 est donc un ordonnancement des 45 séries qui seront reviewées pendant ces quelques semaines. Mais attention : si une série ne figure pas dans le classement, ça ne veut pas dire qu'elle est jugée pire que les 45 séries présentes. Bonne lecture !
PLACE 10 : BREAKING BAD (saison 4)
J’entends d’ici les cris des fans de la série, dénonçant le scandale quant à la position de Breaking Bad. Je précise que cela concerne bien la saison 4 et non la série en elle-même. La saison 4 est sans nul doute la plus faible de la série, tout en restant bien évidemment au-dessus de la plupart des séries proposées à l’heure actuelle sur les chaînes américaines.
Après un cliffangher tonitruant en fin de saison, les premiers épisodes de Breaking Bad ont pour tradition de clore petit à petit le chapitre précédent avant de lancer les nouveaux axes. Cette année, cette transition a été particulièrement appuyée, marquée par quelques errements et maladresses dans le récit qui ont entaché le début de saison.
Le génie de la série s’illustre par le parcours du personnage de Walter White. De prof de chimie looser et dépassé par les événements à la genèse de la série, Walter s’est peu à peu transformé en implacable calculateur, en monstre réfléchi et sans pitié. Cette métamorphose, brillamment amenée, est la résultante de chacune des scènes constituant les quatre saisons de la série. Son basculement en dangereux psychopathe ne s’est pas opéré de façon abrupte, mais est bien la conséquence de tout son vécu. La série a pris le temps pour légitimer ce changement de caractère. On avait probablement pas vu un tel développement depuis celui de Vic McKey dans The Shield où chaque action des précédents épisodes avait des conséquences sur les épisodes suivants, jusqu’à l’incroyable final de la série.
Mais cette saison marque un tournant particulier dans la psychologie du personnage. Un tournant entamé depuis l’arrivée de Gus. La prestation de Giancarlo Esposito est glaçante, l’acteur parvient à imposer un charisme fou, à dégager un magnétisme crevant l’écran d’un simple regard. Le Walter des dernières saisons, inquiétant et impitoyable manipulateur, est la création de Gus. Les deux personnages sont similaires sur de nombreux points. En voulant éliminer Walter après le meurtre de Gale, Gus va obliger Walter à s’élever à son niveau de maîtrise et de pouvoir. L’élève a dépassé le maître.
On comprend assez vite qu’un tel affrontement ne peut se solder que par la mort de l’un des deux. Mais le chemin pour en arriver là est teinté d’embuches. La guerre froide entre les deux personnages n’est pas toujours exaltante, certaines scènes étant particulièrement contemplatives. Parallèlement, la rechute de Jesse était nécessaire suite au cliffangher mais elle est bien moins prenante que sa précédente descente aux enfers.
En réalité, Breaking Bad est plus qu’une excellente série. Elle a aussi inventé – ou réinventé tout du moins – un véritable style. La série est un western moderne, au style très contemplatif. Cela donne des scènes d’action unique en leur genre car la série joue avant tout sur la tension psychologique plus que sur la pure action. La même scène qui durerait 30 secondes dans 24 peut aller jusqu’à 10 minutes dans Breaking Bad. Le résultat est d’une puissance incroyable puisque ces scènes vous écrasent littéralement de part leur tension insurmontable, ne permettant pas une seconde de respiration, comme un grand huit sans fin.
Mais le danger résultant de l’invention d’un style de réalisation est d’y avoir recours un peu à tord et à travers. Breaking Bad a parfois tendance à verser dans cet excès en utilisant ce procédé dans des scènes où ce n’est pas nécessaire. Les scènes de délire de Jesse en sont la parfaite illustration.
L’affrontement entre Gus et Walter est donc au centre de la saison 4. Au fur et à mesure de la saison, l’épée de Damoclès ne cesse de se rapprocher de leur tête, créant une ambiance très lourde, très oppressante. En cela, Breaking Bad est une pure expérience télévisuelle d’où leur ressort éreinté. Le terme de « partie d’échec » prend tout son sens tant chacun avance peu à peu ses pions, en attendant la réaction de l’autre. L’étau se resserre inextricablement jusqu’à l’échec et mat final sous la forme d’un season finale monstrueux. Breaking Bad a beau se complaire parfois dans sa lenteur, elle atteint parallèlement de tels niveaux de puissance que, quoi qu’il arrive, la série est définitivement sur la voie de la canonisation suprême.
Mais cette saison, l’évolution de Walter est d’autant plus marquée côté familial. Sa nouvelle relation avec Skyler est très bien orchestrée. Cette dernière est peu à peu passée du rôle d’ex-femme bafouée à celui de partenaire de crime. Sa perception de Walter est très fluctuante, déchirée entre le mépris qu’elle a éprouvé son égard et la fascination qu’il exerce sur elle. La scène où ils remettent le couvert en milieu de saison est en cela très forte, comme si elle couchait avec un inconnu tant il ne ressemble plus en rien à l’homme qu’elle a épousé.
Le rapport de force entre les deux personnages a ainsi totalement basculé en l’espace de quelques saisons. La confiance gagnée par Walter grâce à son rôle de parrain de la drogue fait tâche d’encre sur sa vie familiale. Il ne craint plus rien, n’a plus peur de rien. L’homme se sent au-dessus de la mêlée, comme si sa famille était devenue trop inintéressante, trop banale pour lui. La mission première de Walter qui était d’amasser de l’argent pour sa famille est clairement passée derrière son égo qui ne cesse de grossir d’épisode en épisode, incarné par une froideur terrifiante.
La façon qu’il a de traiter sa belle-famille est très symptomatique de ce changement. Les scénaristes ont enfin rendu intéressant le personnage de Hank. Vic McKey du pauvre au démarrage, Hank est désormais devenu l’épine dans le pied de Walter. Epine qu’il s’est lui-même plantée puisque l’accident d’Hank est de la faute de Walter. L’image est très forte : si Hank n’avait pas eu cet accident, il ne serait probablement jamais devenu aussi obsessionnel quant à l’enquête autour de Gus et du cartel. Par son égoïsme exacerbé, Walter s’est ainsi lui-même plongé dans cette situation.
Mais ce dernier semble peu s’émouvoir de la situation d’Hank, qu’il n’a de toute façon jamais aimé. Walter est devenu l’homme fort tandis qu’Hank est devenu le faible. Leurs scènes sont d’autant plus puissantes que Hank ne sait pas que l’homme qui a gâché sa vie, l’homme qu’il hait le plus le monde, n’est d’autre que son demi-frère. Le voir en fauteuil roulant est un rappel permanant des dérives de Walter. Je ne serais pas surpris si à un moment ou un autre, Walter assassinait Hank de sang froid, avec un malin plaisir et sans aucune considération pour Marie. Cette dernière a également gagné ses galons durant cette saison.
Et tout cela pour parvenir, j’en parlais, au season finale. Tout simplement brillant. Magistral. Inattendu. D’une niveau de tension, de pression, à chaque instant, tout simplement insurmontable. Breaking Bad parvient à nous figer pendant 45 minutes devant notre écran, plus qu’aucune autre série. Je n’en dirais pas plus par peur de trop gros spoilers. Seul regret : il semble parfois que la série ait parfois oublié son pitch, à savoir le cancer de Walter. On en vient parfois à se demander s’il en est toujours atteint…
En deux mots : Le début de la saison 4 de Breaking Bad a péché par son manque de punch, se regardant parfois un peu trop le nombril. Mais la série retrouve très vite son niveau, installant une ambiance éprouvante et électrisante qui ne la quittera plus jusqu’au final époustouflant, surement le meilleur épisode de l’année, toutes séries confondues. Breaking Bad est l’une des rares série à allier à la perfection puissance des intrigues et profondeur des personnages. Elément qui fera d’elle, quoi qu’il arrive, l’une des séries les plus marquantes de la décennie.
RENDEZ-VOUS LUNDI A 9H POUR DECOUVRIR LA PLACE N°9.
RETROUVEZ TOUTES LES CRITIQUES PRECEDENTES EN CLIQUANT ICI.